mercredi 14 août 2013

MOSCOVICI ET LA CROISSANCE : C'EST PAS GAGNE

" La France sort de la récession. Grâce à un rebond d'une ampleur inattendue de son produit intérieur brut de 0,5%, annoncé mercredi 14 août par l'Insee, elle enregistre son chiffre de croissance le plus important depuis le premier trimestre 2011. Pour mesurer l'importance de cette éclaircie économique, francetv info a interrogé Eric Heyer, directeur adjoint au Département analyse et prévision de l'Observatoire français des conjonctures économiques. Il redoute un faible impact sur le front de l'emploi.

Francetv info : Comment faut-il accueillir ces chiffres ? 

Eric Heyer : Il faut s'en féliciter. C'est une bonne nouvelle pour le gouvernement, qui visiblement ne s'y attendait pas. Cela compense les deux derniers trimestres, qui étaient négatifs, et on est bien parti pour que le budget de cette année, voté à 0,1%, soit respecté. Attention toutefois, car ces chiffres sont provisoires et peuvent être révisés par l'Insee, à la hausse comme à la baisse. Les grosses révisions interviennent un an après les premiers chiffres, au moment des comptes annuels, et des modifications pourront encore être apportées jusqu'à un an et demi après ces comptes.

D'où vient cette croissance surprise ?

Elle repose essentiellement sur la consommation des ménages (+0,3%), que personne n'attendait. Avec un pouvoir d'achat en berne, les Français ont sans doute fortement réduit leur taux d'épargne [la part de leur revenu consacrée à l'épargne]. Cela ne va pas être reproductible longtemps, car ils ne vont pas pouvoir puiser indéfiniment dans leurs bas de laine. Cette croissance est donc bonne à prendre mais elle n'est ni stable ni durable.

Ne peut-on pas compter, à l'avenir, sur un taux d'épargne réduit des ménages ?

Il est trop tôt pour le dire. La France a l'un des taux d'épargne les plus élevés des pays développés, entre 15,5 et 16,5%. Peut-être est-ce terminé, avec un nouveau modèle aux alentours de 10 ou 12%, comme les autres pays. Il y aurait alors un potentiel de rebond économique. Pour l'heure, il va falloir s'appuyer sur d'autres relais de croissance.

Par quoi passera une éventuelle croissance lors des prochains trimestres ?

On pourra vraiment parler de reprise économique quand les investissements repartiront de façon considérable. Les entreprises ont continué à réduire leurs investissements au cours du deuxième trimestre, elles vont devoir réinvestir. Les bons chiffres de croissance annoncés ce mercredi vont aider les entreprises dans ce sens, les incitant à anticiper un rebond, mais ce qui compte avant tout est leur carnet de commandes. Or, pour l'instant, les entreprises se disent en surcapacité. Tant que les commandes ne repartiront pas, elles ne recommenceront pas à investir. Il faut pour cela qu'il y ait une confirmation de la croissance pendant un ou deux trimestres.

Les bons chiffres de la croissance peuvent-ils générer des emplois ? 

Les chiffres de l'emploi, également publiés ce mercredi, sont négatifs, confirmant que les entreprises sont en sureffectif abondant. Dans un premier temps, la croissance n'ira pas tant dans l'embauche que dans une diminution des réductions d'effectifs. De toute façon, on sait que le décalage entre la croissance et le marché du travail est de l'ordre de trois trimestres. Donc, s'il doit y avoir des bonnes nouvelles sur le marché du travail, elles n'arriveront qu'au début de l'année prochaine. "

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