" Je me suis permis de prendre un temps d’arrêt pour terminer le manuscrit du livre que je publierai sur la règlementation bancaire internationale et la recherche de stabilité financière. Ecrire un livre est toujours une catharsis, mais aussi un moment qui permet de prendre le recul nécessaire pour répondre a la question : que pouvons-nous espérer ?
L’euphorie boursière de l’année boursière 2013 a permis aux investisseurs de réveillonner avec le sentiment que la hausse des indices boursiers leur a été éminemment favorable. En Europe, à l’exception de l’Autriche, les indices sont tous supérieurs a 10% alors que l’économie européenne stagne.
Parmi les pays en difficulté, l’Irlande (33.5%) et la Grèce (27,9%) sont dans les trois premiers, en avance sur l’Allemagne (25.5%). Poussées par un vent de croissance aux Etats-Unis (le Dow Jones Dow Jones est passé de 13.400 a 16.600 soit une hausse de près de 30%), les actions européennes ont connu une croissance impressionnante sans pour autant rattraper le niveau antérieur à la crise financière.
L’économie réelle
Il est difficile, dans l’euphorie, d’être parfois celui qui tente de rationaliser. Toutefois, sans une croissance économique, les croissances boursières ne peuvent s’expliquer que par des facteurs exogènes : dans le cas de l’Europe et des Etats-Unis, le maintien de taux artificiellement bas par les banques centrales a joue un rôle mais ne peut pas durer. Cette politique de quantitative easing est une manière indirecte d’utiliser les capitaux publics à des fins privées.
Aux Etats-Unis, la hausse des bénéfices des entreprises joue un rôle déterminant, alors que ce n’est pas le cas en Europe où ces bénéfices sont 25% en-dessous du niveau de 2007. La difference entre les Etats Unis et l’Europe serait à son niveau le plus élevé depuis un quart de siècle selon une étude de l’UBS.
La croissance américaine est prévue à 2,6% pour 2014 contre 1,1 % en Europe. Il n’y a donc pas de quoi se réjouir, et les problèmes de l’emploi en Europe sont particulièrement dramatiques alors que les Etats-Unis ont créé des emplois chaque mois pendant trois ans : la dernière perte d’emploi remonte à septembre 2010.(chiffres du Bureau of Labor Statistics)
Les finances publiques
Au moment où les décisions budgétaires vont s’appliquer, de grandes inégalités existent entre les pays. L’année 2013 a vu les taux français – à dix ans- augmenter (2,55%), les taux italiens (3,92%) stagner et les taux espagnols (3,88%) diminuer.
Deux pays inquiètent dans la mesure ou leur endettement est énorme, et augmente en relation avec le PIB (La France qui passera en 2014 de 90 a 95%) et l’Italie qui a atteint 130% et, si elle ne réagit pas drastiquement, atteindra 140% en 2014). Ce sont les deux principales menaces sur l’Eurozone.
Le secteur bancaire
La bonne nouvelle a été l’annonce que les banques espagnoles ne requièrent pas les 100 milliards d’euros qui leur avaient été promis, et vont commencer a rembourser les 42 milliards empruntés à L’Europe.
Tant en Europe qu’aux Etats-Unis le lobby bancaire a réussi à diluer les mesures de règlementation qui auraient été les plus douloureuses. Le Financial Times rapporte ce 5 janvier que la Commission Européenne ne va pas agir de manière contraignante pour séparer les activités de trading et de banque, et qu’il n’y aura pas de contraintes équivalentes sur l’utilisation des fonds propres (proprietary trading) à des fins spéculatives. La faiblesse des banques européennes par rapport à leurs consoeurs américaines est inscrite dans les taux, et les cours des actions.
La décision européenne relative à la solution des crises bancaires a été annoncée par les Ministres des Finances : mais en y regardant de plus près, des doutes continuent à exister sur l’efficacité de mesures dont le processus de décision est incroyablement complexe et politisé.
L’examen de la santé de 124 banques européennes par la Banque Centrale Européenne pourrait avoir des conséquences sur le secteur : si la BCE n’est pas transparente, la méfiance continuera. Si elle l’est, certaines banques risquent de se trouver en difficultés. Mario Draghi a été très clair sur ce sujet.
La crise de 2014 aura-t-elle lieu ?
A écouter les commentaires de fin d’année, deux thèmes émergent : les banques et l’endettement public européens et les difficultés liées à l’opacité du secteur des shadow banks, institutions financières qui se sont développées en marge des restrictions imposées aux banques. Par deux fois, la Chine a du intervenir pour éviter une crise de liquidité imminente dans ce secteur en croissance rapide dans le monde et particulièrement en Chine.
Je ne cherche pas à noircir le tableau, mais dessoulés de nos réveillons, nous nous devons de regarder lucidement les défis qui sont devant nous, et tenter de nous y colleter avec détermination et courage. Trop d’éléments contribuent à une forme d’instabilité structurelle, et une crise financière en 2014 reste probable. "
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