" Plusieurs dizaines de milliers de manifestants ont défilé dans le calme dimanche à Paris et à Lyon pour protester contre la politique familiale du gouvernement, dans le prolongement du mouvement contre le mariage homosexuel.
Les organisateurs ont revendiqué plus de 500.000 participants pour la manifestation parisienne, organisée entre l'Ecole militaire (VIIe Arrondissement) et Denfert-Rochereau (XIVe), et 40.000 dans le centre de Lyon. La préfecture de police en a dénombré 80.000 à Paris et 19.500 à Lyon.
Une semaine après le "jour de colère" organisé par plusieurs organisations, certaines issues de l'extrême droite, le ministre de l'Intérieur Manuel Valls a dénoncé l'émergence d'un "tea party à la française", s'attirant les foudres de l'UMP qui l'accuse de vouloir promouvoir un "noyau dur" de l'opposition pour l'affaiblir.
Fer de lance de l'opposition au mariage gay voté l'an passé, le collectif "La Manif pour tous" appelait à la mobilisation pour la défense de la famille menacée, selon lui, par le gouvernement et sa majorité.
Il les soupçonne, malgré les nombreux démentis, de vouloir étendre la procréation médicalement assistée (PMA) aux couples de femmes à l'occasion du débat parlementaire sur la future loi sur la famille et de chercher à légaliser la gestation pour autrui (GPA) avant la fin du quinquennat.
"C'est toujours le même message, simplement on voudrait qu'il soit entendu. Le message, c'est la défense des droits de l'enfant et de la famille. Un enfant a droit à un père et une mère", a déclaré Michel Girard, un manifestant venu de l'Oise.
Pour Séverine Chevrier, de Paris, "pas grand'chose n'a changé" depuis les manifestations contre le projet de loi sur le mariage homosexuel avant son adoption le printemps dernier.
"FRONDE DES ANTI"
"M. Hollande ne nous écoute pas, ne veut pas dialoguer avec nous. En revanche, M. Valls a été très clair dans ses propos vis-à-vis de nous : il va tout faire pour nous faire taire mais nous on est dans notre bon droit, on a le droit de s'exprimer, on a le droit d'être dans l'opposition."
Dans une interview au Journal du dimanche, le ministre de l'Intérieur a exprimé son inquiétude face au climat actuel, déclarant que l'on assistait "à la création d'un tea party à la française", une référence à l'aile ultra-conservatrice du Parti républicain américain.
"S'engouffrant dans la crise de projet et de leadership de la droite, et face au recentrage du Front national, une droite conservatrice et réactionnaire s'est libérée. Avec l'opposition au mariage pour tous, elle a décuplé ses forces", a-t-il dit.
Et Manuel Valls de dénoncer une "fronde des anti : anti-élites, anti-impôts, anti-Parlement, anti-journalistes", avant d'appeler la droite républicaine "à se démarquer clairement des mouvements qui n'acceptent pas la démocratie et les choix du Parlement".
Présent parmi les manifestants, le député UMP Henri Guaino a accusé le ministre de l'Intérieur de décrire "la stratégie d'une partie de la gauche, qui veut par tous les moyens, par une politique qui divise, faire naître un noyau dur radicalisé de façon à affaiblir l'opposition".
DIX-HUIT INTERPELLATIONS
L'ancien conseiller de Nicolas Sarkozy à l'Elysée a estimé que les manifestations marquaient "le refus de cette politique de destruction systématique de tout ce qui nous permet de vivre ensemble, de cette politique du fait accompli, disons-le presque du coup de force dans laquelle on met tout le monde au pied du mur sous prétexte que la majorité est majoritaire".
D'autres députés UMP, comme Claude Goasguen et Philippe Gosselin, ont défilé à Paris, de même qu'à Lyon Hervé Mariton et trois de ses collègues.
Le Front national était aussi représenté à Paris, avec la députée Marion Maréchal-Le Pen, et à Lyon. Des représentants religieux, le cardinal Philippe Barbarin et le recteur de la grande mosquée de Lyon Kamel Kabtane, étaient dans les premiers rangs du cortège dans la capitale des Gaules.
Après les débordements du "jour de colère", un important dispositif de sécurité a été mis en place, mobilisant 1.500 policiers à Paris entre l'Ecole militaire (VIIe arrondissement) et Denfert-Rochereau (XIVe), et 600 dans le centre de Lyon.
La préfecture de police a fait état de l'interpellation, en marge de la manifestation, de 18 personnes, dont un dirigeant du GUD, un mouvement étudiant d'extrême droite, pour des contrôles d'identité. Une d'entre elles a été placée en garde à vue pour détention de fumigènes.
La manifestation de dimanche est intervenue par ailleurs après une vive polémique sur une expérimentation, dans des écoles primaires, de cours sur "l'ABCD de l'égalité" pour lutter contre les stéréotypes filles-garçons, ses opposants y voyant un début d'enseignement de la "théorie des genres qui nie l'altérité homme-femme".
"On a prouvé que ce n'était pas une rumeur, la théorie du genre est bien enseignée à l'école", a déclaré Anne Lorne, coordinatrice de "La manif pour tous" à Lyon. "Nous sommes pour la lutte contre l'homophobie mais contre l'éducation sexuelle à l'école primaire." "