" Lundi, Manuel Valls était en Moselle pour apporter son soutien au maire de Forbach. Le thème de la journée était, paraît-il, la « sécurité », et Manuel Valls a pu, dès le matin, faire la preuve de sa grande fermeté en la matière : pour la France, on ne sait pas, mais enfin pour le ministre de l’Intérieur – ce qui est déjà un début –, on frôle le zéro défaut. Un cordon de sécurité sans faille. Soyez rassurés, Manuel Valls ne risque rien, personne ne peut l’approcher, pas même ses amis.
Édouard Martin, l’ancien syndicaliste CFDT d’ArcelorMittal promu il y a quelques semaines tête de liste dans le Grand Est aux européennes, devait l’accueillir à Florange… il a été refoulé comme un malpropre. Faisait le pied de grue depuis huit heures du matin, criait haut et fort qu’il avait été mandaté par les élus lorrains, rien n’y a fait. Un ordre est un ordre. On l’a empêché de rejoindre le ministre.
Un peu bourrin, le service d’ordre de Manuel Valls. Ou un peu paranoïaque, comme le patron. Mais, je vous le demande, qui ne le serait pas à leur place ? Assurer la sécurité de Manuel Valls, c’est un boulot terrible. Il faut se méfier de tout et de tout le monde : il y a d’abord les jeunes filles rangées et les jeunes gens bien peignés. Vous font des sourires, se faufilent en demandant pardon de vous avoir marché sur le pied, et une fois devant Valls, sortent comme un diable de leur boîte en agitant des drapeaux roses LMPT.
Mais la France de la diversité, celle des capuches et des tchadors, ces derniers temps, ne vaut pas mieux… Jamais à l’abri d’une quenelle dans le dos ou d’une question désagréable sur la théorie du genre. Une bande d’ingrats. Qui oublient qu’on a largué pour leurs beaux yeux tout le monde ouvrier… Dont, de ce fait, ben voilà, on doit aussi se méfier. Rien de plus rancunier qu’un métallurgiste de Florange. Et puis, fort comme un turc. Alors quand on voit un plouc gouailleur, gaulé comme une armoire lorraine, entouré de deux syndicalistes en « chasuble orange », on ne peut pas deviner, non plus, qu’il est anobli de l’avant-veille, adoubé candidat PS, et qu’il fait donc partie de l’élite qui peut entrer dans le carré VIP. C’est le problème des parvenus, leur extraction continue longtemps de leur coller à la peau.
Puis le service d’ordre, lui, ne fait que le pointage à l’entrée. Si Édouard Martin n’était pas sur la liste, c’est que Manuel Valls l’avait oublié. Zappé. Le trou noir. Complètement sorti de l’esprit. Comme la femme de ménage que l’on a invitée au mariage parce qu’elle a donné un coup de main pour déplacer les chaises et finir de coudre l’ourlet du cortège, mais que l’on n’a pas marquée sur le plan de table. Pas par méchanceté mais parce qu’on n’y a pas pensé. Alors, elle reste dehors sous la pluie d’un pied sur l’autre, gênée comme Édouard Martin qui répétait lundi : « Après, c’est pas grave, hein, je vais pas non plus lui courir après… » Ce héros de Zola, qui pensait pourtant qu’il suffirait de se vendre au PS pour passer de Germinal à La Conquête de Plassans, et taper dans le dos de celui qui, par-delà les Pyrénées, fut autrefois – quand il s’appelait Eduardo Martin Benitez – son compatriote.
Mais il paraît que la boulette a été réparée. Selon le cabinet du ministre, « Édouard Martin a pu s’entretenir avec Manuel Valls »… Et lui a peut-être offert son livre, Ne lâchons rien ? Un titre qui sonne comme une sage résolution, car pour qu’au PS on ne pense pas seulement à lui pour racoler les ouvriers, le métallo va devoir s’accrocher. "
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