" Les élus demeurent impuissants face à la prostitution rurale qui se développe le long des routes nationales, de préférence en bordure de terrains agricoles.
Tout au plus ont-ils réussi à déplacer le problème… Mais les maires de l'Aude, du Gard ou de l'Hérault demeurent impuissants face à la prostitution rurale qui prolifère le long des routes nationales, de préférence en bordure de terrains agricoles. Entre le pont du Gard et Avignon, des dizaines de femmes, souvent originaires des pays de l'Est, investissent les chemins en bordure de vignes et maraîchages. Devant l'Assemblée nationale, le député de secteur Patrice Prat (PS) a dénoncé une situation intenable: «Les forces de l'ordre s'avouent impuissantes à endiguer ce phénomène, faute de dispositif juridique. Les élus locaux et notamment les maires des communes concernées, sont de plus en plus excédés par l'amplification et la dégradation de la situation.» Ici, comme sur la route nationale reliant le village de Roquemaure à la centrale nucléaire de Marcoule (Gard) les freinages intempestifs, écarts de conduite, et demi-tours hasardeux sont légion, alors qu'y circulent des dizaines de milliers de véhicules par jour, notamment de nombreux poids lourds. Pour tenter, en vain, d'éradiquer le phénomène, les maires des communes de Rochefort-du-Gard, Domazan, Estézargues et Saze ont, en juin dernier, signé un arrêté municipal interdisant le stationnement prolongé le long de la nationale et permettant à la police municipale de Rochefort de dresser des PV électroniques sur le territoire. Après 6 mois d'expérimentation, cinq PV ont été rédigés… Et la ville de justifier: «Les automobilistes détalent en voyant arriver la police municipale.»
Le client est donc davantage visé que la prostituée, puisque, comme le reconnaît un gendarme du cru, «on ne peut pas verbaliser une personne qui patiente sur le bord d'une route même en minijupe». À Nissan-lez-Enserune (Hérault), une commune située sur la nationale reliant Béziers à Narbonne (Aude), un collectif antiprostitution s'est constitué. «Voilà maintenant trois ans que cela dure!» dénonce l'association sur son site Internet, évoquant par ailleurs l'absence «de mobilisation des pouvoirs publics.»
Des actions coup-de-poing
En novembre dernier, les gendarmes de la section de recherche de l'Hérault ont pourtant arrêté trois nouveaux suspects dans une opération antiproxénétisme débutée deux ans plus tôt. Baptisée Proxo11, elle a permis l'arrestation d'une vingtaine de personnes, dont des souteneurs présumés (certains toujours incarcérés dans l'attente de leur procès), originaires des Balkans et responsables d'une traite impliquant, dit-on, une centaine de femmes. En début de semaine, les communes de Béziers, Lespignan, Nissan-lez-Enserune et Colombiers, ainsi que le conseil général de l'Hérault, ont pris des arrêtés visant à interdire la prostitution le long de la route départementale… Révélateur de l'impuissance des villages à faire face à la situation, il stipule: «Il est interdit aux personnes se livrant à la prostitution de stationner ou se livrer à des allées et venues répétées» sur cette route et certains autres chemins. Les contrevenants risquent 38€ d'amende pour ce qui ressemble tout de même fort à une entrave à la liberté de circulation dans l'espace public.
À la communauté de communes La Domitienne, sur laquelle se trouvent les trois dernières communes, on reconnaît sans peine que, «malgré les contrôles de gendarmerie, qui fait des actions coup-de-poing, la prostitution revient systématiquement. Ces contrôles, ça sert sur quelques jours où ça se calme, et puis ça revient.»
Ici, comme dans le Gard, les prostituées sont déposées le matin par leur souteneur et récupérées le soir avec le produit de leur journée. À Nissan, comme sur les routes gardoises menant à Avignon, la communauté de communes a fait installer, avec l'accord des agriculteurs, des pierres, et des barrières pour empêcher les voitures de se garer. Une démarche volontaire qui s'avère bien insuffisante. «On a condamné certains petits chemins vicinaux. Mais les prostituées en ont vite trouvé d'autres. On a fait œuvre de salubrité publique en embauchant cet été trois personnes, explique-t-on encore à la communauté de communes La Domitienne. On a nettoyé cinq tonnes de déchets, comme des préservatifs, des matelas…» L'initiative devrait a priori être reconduite au printemps. "
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