mardi 24 décembre 2013

ET APRES ILS VOUS DISENT QUE LE RAPPORT SUR L'INTEGRATION N'ETAIT QU'UN PROJET

" Les mères voilées accompagnant des sorties scolaires ne sont pas soumises, par principe, à la neutralité religieuse, a estimé le Conseil d'Etat lundi 23 décembre. La plus haute juridiction administrative a tout de même rappelé que « les exigences liées au bon fonctionnement du service public de l'éducation peuvent conduire l'autorité compétente, s'agissant des parents qui participent à des déplacements ou des activités scolaires, à recommander de s'abstenir de manifester leur appartenance ou leurs croyances religieuses ».
Interrogé par le défenseur des droits sur plusieurs questions relatives à la laïcité et au service public, notamment l'accompagnement de sorties scolaires par des mères voilées, le Conseil d'Etat n'a fait aucune mention explicite, dans son étude, de la circulaire Chatel. Ce texte de l'ancien ministre de l'éducation Luc Chatel, datant de 2012, demande que les mères d'élèves accompagnant les sorties scolaires ne portent pas de signes religieux ostentatoires. Dans les faits, elle continue de s'appliquer, rappelle le ministère de l'éducation.

Dans sa saisine, le défenseur constatait que, « sur le terrain », les « dispositions prises [variaient] d'un établissement à l'autre ». Dominique Baudis évoquait des « zones d'ombre » dans les textes et souhaitait « pouvoir être en mesure d'apporter des réponses étayées » aux personnes qui l'avaient interrogé. « La présente étude, purement descriptive, n'a [...] pour objet ni de dresser un panorama de la laïcité ni de proposer des évolutions, quelles qu'elles soient, mais de dresser un constat du droit en vigueur », rapelle le Conseil d'Etat dans son étude.

APPEL À UNE « OFFENSIVE LAÏQUE »

Réagissant à la publication de cette étude, le ministère de l'éducation s'est empressé d'affirmer que la circulaire Chatel « rest[ait] valable ». Le ministère réaffirme que « le milieu scolaire est un cadre qui doit être particulièrement préservé » et estime, dans un communiqué, que cette circulaire datant de mars 2012 « est mise en œuvre sur le terrain avec intelligence, en privilégiant toujours la voie du dialogue ».

L'ancien ministre de l'éducation nationale Luc Chatel a lui-même réagi à cette décision, estimant qu'« il ne [pouvait] y avoir de laïcité à géométrie variable, de laïcité à la carte » et qu'« il [fallait] renforcer la loi de 2004 sur les signes religieux ostentatoires à l'école ». L'avis du Conseil d'Etat « souligne le flou et l'ambiguïté de la législation actuelle », a ajouté l'actuel vice-président délégué de l'UMP, qui a appelé « les républicains de tout bord [à] s'unir pour défendre la laïcité et la neutralité du service public ».

La présidente du Front national, Marine Le Pen, a pour sa part invité le gouvernement à « ne pas suivre cet avis » et à proposer une loi « interdisant de façon définitive ces signes religieux ostensibles chez les accompagnants ». 

L'avis du Conseil d'Etat « confirme l'affaiblissement considérable du principe de laïcité dans notre pays », a condamné Marine Le Pen dans un communiqué. « Devant la progression inquiétante du communautarisme et des revendications politico-religieuses [...], seule une offensive laïque majeure face à tous les obscurantismes permettra de stabiliser nos principes essentiels », selon elle.

L'AFFAIRE BABY LOUP

L'avis du Conseil d'Etat n'est pas sans rappeler l'affaire Baby Loup, lorsque Fatima Afif est licenciée en décembre 2008 pour « faute grave » en raison de son souhait de porter le voile sur son lieu de travail. En France, l'affaire est devenue emblématique des rapports entre islam et laïcité. A la suite de nombreux rebondissements judiciaires, Dominique Baudis avait demandé que soit clarifiée la frontière entre « missions de service public et missions d'intérêt général », qui n'imposent pas les mêmes règles aux intervenants.

Après la décision de la cour d'appel de Paris en novembre, qui a confirmé la légalité du licenciement de la salariée voilée, la Cour de cassation sera amenée à se pencher une nouvelle fois sur l'affaire Baby Loup au début de 2014. Les précisions du Conseil d'Etat sur les contours des différentes missions, et donc des différentes obligations, constitueront un nouvel élément d'appréciation dans ce dossier. "

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