" La très active politique de traitement social du chômage du président couplée avec le ralentissement de la progression de la population active devrait lui permettre d'afficher une baisse du nombre de chômeurs à la fin de l'année alors que le taux de chômage continuera de progresser pendant encore un an.
Même si François Hollande considère que «la politique, ce n'est pas de la magie», comme il l'a répété le 14 juillet, le chef de l'État est toutefois en train de réussir un très joli tour de passe-passe sur la question de la baisse du chômage. Le président de la République est en effet en capacité de réaliser le coup de force de tenir son engagement «d'inverser la courbe du chômage à la fin de l'année», et peut-être même avant, et ce alors que le taux de chômage est à la hausse, toutes les institutions internationales (FMI, OCDE, commission de Bruxelles…) prévoyant un niveau record, supérieur à 11%, à la fin 2014.
La raison de ce tour de magie est simple. François Hollande et les prévisionnistes ne parlent pas de la même chose. Le chef de l'État, lui, se base sur le nombre de chômeurs recensés à Pôle emploi (les demandeurs d'emploi inscrits en fin de mois en catégorie A) tandis que les organisations internationales parlent, elles, du seul taux de chômage qui prend en compte une autre définition, celle du Bureau international du travail (BIT) différente et plus restrictive*. On a donc d'un coté une donnée administrative qui varie au mois le mois et de l'autre un taux statistique trimestriel calculé sur la base de sondages. Il est d'ailleurs déjà arrivé par le passé que les deux indicateurs divergent momentanément…
Or il est assez facile de faire varier mécaniquement le premier, et François Hollande, depuis son arrivée au pouvoir, ne s'en prive pas. Le technique est de faire changer de catégories (de la A vers les quatre autres) le maximum de demandeurs d'emploi en fin de mois. C'est ce qu'on appelle «le traitement social du chômage», qui tourne à plein depuis un an mais n'est nullement l'apanage de la gauche. En 2013, pas moins de 600.000 contrats aidés vont être pourvus auprès des chômeurs les plus éloignés du marché du travail, 100.000 emplois d'avenir à destination des jeunes sans qualification issus des banlieues sensibles ou zones rurales sinistrées, 70.000 contrats de génération et 30.000 à 35.000 chômeurs supplémentaires (l'Élysée et Matignon divergent sur l'objectif) qui vont basculer en formation d'ici la fin de l'année.
L'un dans l'autre, ce soutien massif de l'État, essentiellement dans le secteur non-marchand (collectivités, associations, hôpitaux), devrait donc permettre au président de la République de tenir son engagement d'afficher une inversion de tendance à la fin de l'année. Surtout que la durée des contrats aidés, qui étaient jusqu'alors de 8 mois en moyenne, a été portée à 12 mois minimum. «La question de la durée des contrats a vraiment un effet», se félicite-t-on d'ailleurs au cabinet de Michel Sapin, le ministre du Travail. La petite inflexion sur la population active attendue cette année (avec, d'un côté, moins de seniors qui partent tard en retraite avec le retour partiel à la retraite à 60 ans, et de l'autre des jeunes qui font plus d'études pour retarder leur entrée dans la vie active) devrait aussi avoir un effet non négligeable.
Agir sur le taux de chômage est en revanche plus compliqué. La définition très stricte du numérateur (le nombre de chômeurs) procure peu de marges de manœuvres statistiques à l'exécutif. Quant au dénominateur (la population active), il est lié à un tas de facteurs qui ne dépendent pas uniquement de l'économie et du marché du travail: politique d'immigration, mortalité… Compte tenu de ces aspects et de la conjoncture (notamment l'absence de reprise des créations d'emploi avant début 2015), le taux de chômage devrait donc mécaniquement grimper jusqu'à fin 2014 alors que le nombre de chômeurs en catégorie A au sens de Pôle emploi diminuera. CQFD.
* Chômeurs au sens du BIT - Personne en âge de travailler (15 ans ou plus) qui répond simultanément à trois conditions: ne pas avoir travaillé, ne serait-ce qu'une heure, durant une semaine de référence; être disponible pour prendre un emploi dans les 15 jours et avoir cherché activement un emploi dans le mois précédent ou en avoir trouvé un qui commence dans moins de trois mois. "
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