" Avec l'été reviennent les polémiques autour des grands rassemblements estivaux de gens du voyage. Après les amalgames de Christian Estrosi le week-end dernier, qui ont entraîné une plainte de SOS Racisme, voici la lettre de démission de Christophe Priou, député-maire de Guérande (Loire-Atlantique). Ce dernier entend ainsi souligner son «impuissance» face à l’installation illicite d’une centaine de caravanes sur un terrain de foot municipal. Un coup d’éclat médiatique qui semble avoir porté ses fruits : une ordonnance d’expulsion a été délivrée mardi soir par le tribunal de Nantes. Cependant, l’édile UMP de la ville de Loire-Atlantique se défend d’avoir voulu embrayer sur les déclarations d'Estrosi ; et malgré quelques similarités, le contexte local apparaît effectivement différent.
Dimanche, 150 familles de tsiganes évangéliques investissent les terrains d’entraînement attenant au stade Jean-Ménager de Guérande. Tant pis pour la «fête du jeu» organisée par le conseil municipal des adolescents prévue pour mercredi sur la pelouse. Pourtant, à quelques kilomètres de là, la commune d’Herbignac possède un pré de quatre hectares dédié aux grands passages itinérants, «un beau terrain en herbe, avec l’eau courante, l’électricité, des sanitaires et un système de traitement des déchets» assure le maire socialiste de la commune, Pascal Noël-Racine. Il affirme avoir accueilli sur cet emplacement une mission de 80 caravanes au mois de juin et s’apprête à recevoir un nouveau rassemblement dans une semaine.
«Le terrain est cahoteux, plein de bosses... avec nos caravanes, on peut pas pas y accéder, on n’a pas envie de les abîmer», a rétorqué Djimmy Mayer, pasteur de la mission évangélique, lors d’une conférence de presse improvisée sur les lieux mardi après-midi, reprise par l'AFP. Autre problème pour cette mission, elle n’était pas «inscrite» au planning départemental mis en place par la préfecture avec les municipalités pour accueillir à tour de rôle ces grands rassemblements estivaux, organisés autour de manifestations religieuses.
Lundi soir, lors du conseil municipal, Christophe Priou a convaincu ses adjoints de s’associer à sa lettre de démission envoyée à la préfecture. Laquelle a un mois pour la valider et la rendre effective. «La technique de la démission pour faire pression sur les autorités, ce n’est pas nouveau», pointe Christophe Sauvé, secrétaire général de l’Association nationale des gens du voyage catholiques (ANGVC), en référence à la menace faite par le maire de Cholet (Maine-et-Loire) en 2006 dans des circonstances similaires.
Mardi soir, le tribunal de Nantes a délivré l’ordonnance d’expulsion demandée par le maire, fixant à vendredi après-midi la date butoir pour évacuer les lieux. Plus tôt dans la journée, Patrick Lapouze, directeur du cabinet du préfet de Loire-Atlantique a d’ores et déjà assuré à l’AFP que «l’appui de la force publique sera sans doute accordé si le maire le demande.» "
Le maire de Guérande se défend toutefois de la jouer comme Estrosi. «Je refuse l’amalgame entre Roms et gens du voyage, je ne m’inscris pas dans les propos de Christian Estrosi. Ce n'est pas une histoire de bras de fer, il n’y a ni vainqueur, ni vaincu. Je ne souhaite pas l’usage de la force. Je veux que la raison l’emporte avant la fin de l’ultimatum. Il s’agit là de citoyens français, mais il faut qu’ils comprennent que la loi s’applique pour tous. Sinon, cela nous met en porte-à-faux total avec nos administrés, malgré toute la pédagogie qu’on a pu faire auprès d’eux.» Se défendant d’avoir alimenté la polémique, le député-maire assure avoir voulu seulement manifester «sa résignation et son impuissance à administrer sa commune».
En signe de bonne foi, l’édile insiste sur l’aire d’accueil que possède la commune, où se sont sédentarisées une quinzaine de caravanes à l’année, et sur les programmes de scolarisation mis en place. «Depuis plusieurs années, dans le cadre de l’intercommunalité, nous acceptons les grands rassemblements à tour de rôle, ajoute-t-il. L’an dernier ils étaient sur notre commune et il était prévu selon le schéma départemental qu’ils s’installent à Herbignac cet été. On a tout fait pour que tout se passe normalement, en dialoguant avec les pasteurs dès le mois d'avril, mais au final, ils ont choisi de s’affranchir de l’organisation mise en place. Il n’y a rien de pire que de se retrouver sans solution : ça dessert complètement les gens du voyage et ça donne une image catastrophique des élus.»
«Ils ont fait ce qu’ils voulaient faire. Cette démission, c’était du chantage, du bluff, et ça a marché, constate, résigné, Djimmy Mayer, mercredi matin. On a envoyé 14 lettres, on a eu que des refus, et la seule réponse positive, ce n’était pas dans la région... Avec le maire de Guérande, c'est toujours difficile, il dit qu’il aime les gens du voyage, mais en vrai, il ne joue pas le jeu.»
«Honnêtement, ça ne nous arrange pas de faire péter la barrière et de nous installer dans un terrain comme ça, renchérit Marc Coteau, pasteur évangélique et médiateur entre les gens du voyage et la préfecture. Quand on entre ailleurs que là où c'est prévu, c’est que vraiment ça ne va pas. Le terrain à disposition était dans un état lamentable et donc par ces grandes chaleurs, ils ont pris le premier terrain public avec un peu d’herbe.» Selon Patrick Lapouze, représentant du préfet, «chacun doit y mettre un peu du sien, la solution que les élus proposent n’est peut-être pas parfaite, mais elle existe et me semble acceptable.» Cependant, il y a «embouteillage» dans le planning de la préfecture, et une autre mission tsigane de 140 caravanes est attendue dès dimanche à Herbignac. L’expulsion de la mission ne fera que déplacer le problème, alors que les communes possédant des aires de grands passages restent rares. Le grand ouest, plutôt mieux équipé que d’autres régions, doit faire face à un afflux de rassemblements de plus en plus imposants, qu’il parvient mal à contenir. «Ça sert à quoi d’être bon élève ? demande Christophe Priou. Au final, on se fait plus sanctionner que les municipalités qui ne respectent pas la législation en cours.»
Pour Dominique Raimbourg, député socialiste de Loire-Atlantique qui travaille sur les problématiques liées aux gens du voyage «Christophe Priou est un élu responsable qui a eu un coup de colère, ce qui peut se comprendre. Cependant, de notre côté, on estime qu’on ne fait pas de politique à partir de la colère et il faut reconnaître qu’au niveau national, on est dans une situation de non-droit qui perdure. La moitié des communes de plus de 5 000 habitants qui ont l’obligation d’avoir une aire d’accueil n’ont toujours pas réalisé les travaux nécessaires.» Le député présentera la semaine prochaine une proposition de loi visant à améliorer les relations entre «itinérants et sédentaires» lors d’un coloque des députés socialistes à l’Assemblée.
On peut constater qu'un élu de droite est raciste face aux gens du voyage mais pas un élu de gauche, même si il emploie les mêmes méthodes. C'est assez intéressant en fait !
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