" La situation en Bretagne, à elle seule, expliquerait le recul gouvernemental du jour. Pour que nulle ambiguïté ne subsiste, François Hollande l'a affirmé mardi en marge de sa visite officielle à Bratislava: «La volonté du gouvernement, c'est aujourd'hui d'apporter des réponses aux élus bretons.»
L'explication a tout de l'alibi. Certes, le collectif «Vivre, décider, travailler en Bretagne», qui a lancé les appels à manifester contre l'écotaxe, a servi l'argument sur un plateau à l'exécutif en n'empêchant pas les débordements, ce week-end, en particulier dans le Finistère. C'est à la puissance publique de maintenir l'ordre public, et à l'évidence il est menacé par la violence d'une minorité de protestataires. Mais la décision de suspendre l'écotaxe, outre qu'elle ne garantit pas le retour au calme - la manifestation programmée samedi à Quimper a été maintenue - n'apporte pas le début d'une solution au problème posé. Il peut se résumer simplement: où trouver le gros milliard d'euros nécessaire pour boucler le budget de l'an prochain?
Il faut avoir les yeux de la foi, ou être Bretonne, comme la ministre de la Fonction publique Marylise Lebranchu, pour trouver le geste de Jean-Marc Ayrault «extrêmement courageux». Les avantages à court terme de la suspension sont évidents, sur le terrain d'abord, où les anti-écotaxe vont avoir plus de mal à mobiliser, mais aussi à Paris et, plus précisément, dans la majorité. Les Verts grognent, mais ils ne peuvent pas crier au parjure. Jean-Marc Ayrault a pris soin de le préciser: «Suspension n'est pas suppression.»
L'exécutif espère évacuer la dimension nationale du ras-le-bol fiscal
En revanche, à moyen terme, les effets, comme pour toute mesure dilatoire, risquent d'être désastreux. En liant la recherche d'une sortie par le haut du piège de l'écotaxe à l'élaboration de son «plan d'avenir» pour la Bretagne, l'exécutif espère évacuer la dimension nationale du ras-le-bol fiscal. En réalité, il encourage tous les «pigeons» et autres contribuables exaspérés à suivre l'exemple breton. Comment François Hollande, dont l'autorité s'effrite à chaque recul, pourra-t-il s'opposer à l'extension prévisible du domaine de la lutte fiscale? Jean Glavany, qui travailla au côté de François Mitterrand puis de Lionel Jospin, y est allé de son conseil dans les couloirs de l'Assemblée: «Dans ces conditions, a-t-il jugé, on ne peut pas réformer sereinement et utilement. Il faut que la plaie fiscale se cicatrise et qu'on reparte tranquillement.» Ne rien faire? Il suffisait d'y penser. "
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