jeudi 16 janvier 2014

PLAINTE CONTRE LA GPA

" Choquée par les tournées de promotion de la gestation pour autrui (GPA) organisées en France par des sociétés américaines, une association de juristes vient de déposer plainte contre X. Des sénateurs de l'opposition lui apportent leur soutien et «demandent des mesures concrètes mettant fin à ces pratiques illégales».

Le site www.meres-porteuses.com donne tous les détails en français, des réunions d'information ont régulièrement lieu à Paris et la société américaine Extraordinary Conceptions fournit même une liste de gynécologues et d'avocats français à ses clients… «Le délit se déroulant bien sur le territoire français, il s'agit de mettre fin à deux violations, souligne Me Adeline Le Gouvello, avocate de l'association Les Juristes pour l'Enfance. Celle de la loi française, qui prohibe la gestation pour autrui (GPA), et celle du droit fondamental de l'enfant à connaître, dans la mesure du possible, son père et sa mère, droit garanti par la Convention internationale des droits de l'enfant».

Après avoir déposé, il y a quelques semaines, un recours devant le Conseil d'État contre la circulaire Taubira (facilitant l'obtention d'un certificat de nationalité française aux enfants nés à l'étranger de mère porteuse), l'association persévère dans son combat contre la GPA: les Juristes pour l'enfance, dont l'objet social est «la défense de l'intérêt de l'enfant», viennent de transmettre au procureur de la République «tous les éléments de preuve: vidéos de réunions, catalogue de mères porteuses, grilles tarifaires». «Il s'agit de la première plainte, en France, dans une affaire de GPA», fait valoir l'association, qui précise que «l'article 227-12 alinéa 3 du Code Pénal réprime le fait, dans un but lucratif, de s'entremettre entre une personne désireuse d'adopter un enfant et un parent désireux d'abandonner son enfant né ou à naître». Ce «délit d'entremise» est passible de deux ans de prison et de 30.000 € d'amende.

«Toutes les options pour le bébé à livrer»

C'est Morgane*, une mère de famille de 36 ans, qui a fourni les preuves aux juristes. «Il y a six ans, après un accouchement qui avait endommagé mon utérus, mon gynécologue m'avait recommandé, sans aucune gêne, la gestation pour autrui, raconte la jeune femme. J'ai donc voulu savoir comment cela se passait». Fin septembre 2013, elle s'inscrit finalement «à une réunion surréaliste» organisée par l'agence Extraordinary Conceptions. «Nous étions deux couples hétéros et deux couples homosexuels, se souvient-elle. Une avocate et un médecin américains nous ont détaillé, avec un détachement absolu, toutes les options que l'on pouvait demander pour le bébé à livrer, comme pour une voiture. Les tarifs se montaient à près de 100.000 dollars. Plus 4.000 dollars si on choisissait le sexe de l'enfant».

Il y a quelques mois encore, les agences américaines de procréation médicalement assistée organisaient des soirées avec cocktails et petits fours dans de grands hôtels parisiens. Aujourd'hui, elles se font plus discrètes: c'est dans un immeuble anonyme que Morgane et les autres couples ont été reçus. Mais face à «l'expansion rapide de cette industrie», se félicite Extraordinary Conceptions sur son site en français, «les agences proposant les services de donneuses ou mères porteuses progressent en nombre, les avocats se spécialisent en droit sur la PMA et la demande ne fait qu'augmenter». L'agence, qui «travaille en France depuis dix ans», selon Morgane, «nous a dit qu'elle organiserait une tournée européenne en avril».

«La France ne peut pas d'un côté durcir les sanctions contre la prostitution et, de l'autre, laisser des entreprises organiser la marchandisation du corps de la femme et de l'enfant!, s'offusque Me Le Gouvello. Nous avons fourni au parquet tous les éléments pour qu'il puisse mener son enquête. Il me semble difficile, dès lors, de motiver une absence de poursuites». La plainte a en tout cas déjà attiré l'attention de plusieurs sénateurs de l'opposition. Emmenés par Bruno Retailleau et Gérard Longuet, ces élus demanderont mercredi au gouvernement «des mesures concrètes mettant fin à ces pratiques illégales». "

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