" « Vends bébé contre 8000 € et une voiture d’occasion. » C’est, presque, la petite annonce qu’aurait pu passer un ressortissant roumain interpellé mardi en Haute-Corse, et soupçonné d’être le principal instigateur d’un trafic de nourrissons. La transaction semble irréelle et en tout point sordide mais elle a pourtant bel et bien eu lieu à Marseille (Bouches-du-Rhône) à la fin juillet.
Ilie I., 33 ans, a été écroué en compagnie de Valeriu R., 40 ans, également de nationalité roumaine et père biologique d’un petit garçon, prénommé Tony, né le 21 juillet à l’hôpital Nord de Marseille. Ce bébé, dont la mère pourrait être la sœur du principal commanditaire, a ensuite été revendu à un jeune couple appartenant à la communauté des gens du voyage, implanté dans un camp situé en lisière de la commune de Penne-sur-Huveaune, entre Marseille et Aubagne. Les deux trafiquants d’enfants présumés, arrêtés mardi soir dans un squat à Furiani au sud de Bastia, en compagnie de trois autres compatriotes qui les hébergeaient pour une nuit, attendent désormais d’être transférés à Marseille. « Ils s’apprêtaient, peut-être, à effectuer une nouvelle vente d’enfant en Corse, relate une source judiciaire. Ils semblaient aussi vouloir prendre la fuite en bateau, à destination de l’Italie avant probablement de regagner la Roumanie. » Ces deux hommes encourent jusqu’à dix ans de prison.
Hier, en fin d’après-midi, les parents « acheteurs » ou « adoptants », — Mike G., 25 ans, et son épouse, Carmen, 27 ans —, ont été mis en examen par un juge d’instruction marseillais en charge de ce dossier exceptionnel, et placés sous contrôle judiciaire. Selon nos informations, Mike et sa femme ont pris possession du petit Tony en échange de 8000 € et d’une BMW Série 3 de seconde main…
Après l’interpellation, mercredi, de ses « parents » par les enquêteurs de la brigade de répression du proxénétisme (BRP) de la police judiciaire de Marseille, l’enfant, trouvé en « bonne santé », a été provisoirement confié aux services de la Ddass. Il pourrait prochainement être placé dans une famille d’accueil.
Par ailleurs, Ilie I., surnommé Tarzan, est suspecté d’avoir déjà procédé de la même manière, à plusieurs reprises, notamment au printemps dernier, avec trois autres jeunes femmes, de nationalité roumaine. Ces dernières ont accouché, sous des noms d’emprunt, à l’hôpital d’Ajaccio avant de rapidement quitter les lieux. Selon les premiers éléments de l’enquête, au moins un enfant a ainsi été vendu à une famille de la communauté des gens du voyage, sédentarisée sur l’Ile de Beauté.
« Nous sommes face à un homme qui semble avoir organisé les naissances de plusieurs enfants, destinés à être vendus en France, relate une source proche de l’affaire. Les investigations se poursuivent. Le nombre de bambins acquis via ce réseau pourrait avoisiner la dizaine. Une troisième vente d’un bébé devait intervenir à la mi-septembre, encore à Marseille. La future maman, arrivée en France début juillet, alors qu’elle était déjà enceinte, a été identifiée mais pas les parents qui s’étaient portés acquéreurs de l’enfant à venir. » Au cours de leurs auditions, les époux G., mariés depuis plusieurs années, ont indiqué avoir voulu assouvir leur désir d’avoir un enfant alors qu’ils étaient stériles. « Dans la communauté des gens du voyage, le fait d’avoir des enfants revêt une importance toute particulière, poursuit la même source. Ils semblent ne pas avoir été choqués par la possibilité de pouvoir ainsi monnayer un bébé… » « Je ne peux avoir d’enfant, j’étais prête à tout pour avoir un gosse », a insisté Carmen, à sa sortie du tribunal, hier. « Avec nous, il était heureux, il serait allé à l’école, et n’aurait pas fait la manche comme avec les Roumains », ont également soutenu plusieurs membres de la famille de la mère stérile.
Selon nos informations, Daniela, 32 ans, la maman biologique du petit Tony, prise en charge à l’hôpital Nord de Marseille pour son accouchement, était hostile à voir ainsi son bébé lui être arraché. « Plusieurs témoins ont indiqué que cette maman, qui avait déjà accouché à cinq reprises et qui vivait depuis plusieurs mois en France, avait reçu la visite de la future mère à l’hôpital, révèle un proche de l’affaire.
Les mêmes témoins ont aussi précisé que Daniela était malheureuse d’une telle issue. Mais elle n’a pas eu le temps de se signaler à la police puisque dès la remise de son petit garçon elle a été rapatriée en Roumanie. Elle devrait être prochainement entendue par les enquêteurs. »
Toujours selon nos informations, Ilie I. et les époux G. auraient noué connaissance, début juillet, au cours d’une fête religieuse réunissant des membres de la communauté des gens du voyage à Marseille. « Il semble aussi que les connexions entre les différents protagonistes de ce dossier se sont également faites à travers des modes de vie communs et des petits trafics, ajoute la même source. Les investigations menées notamment en Corse par l’antenne de la PJ de Bastia doivent permettre de retrouver la famille du premier enfant vendu. » "
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